CHRONIQUE – L’artiste oudiste, contrebassiste et compositeur est, cette année, artiste associé au Quartz. Personne multi-casquettes, il fut architecte à Lyon dans les années 80 et archéologue au Caire dans les années 90. Parallèlement à ses mille et une vies (comme les mille jours qu’il restera au Quartz), la musique a toujours été un vecteur d’humanisme pour lui. La musique, il l’exerça très jeune par l’accordéon dans les années 70 puis, par le rock et le hard rock en s’identifiant à Led Zeppelin ou encore Deep Purple.
On est bien loin des envoûtantes mélodies syriennes. C’est ce que garantit le titre trompeur des « Voix d’Alep » et les six artistes qu’il a réunis autour d’une œuvre syrienne contemporaine. Véritable bibliothèque à ciel ouvert, Fawaz Baker tente de rapprocher et d’enseigner la beauté de ces diverses esthétiques, tel un théoricien d’un temps passé. Un témoignage de son amour de la musique : il dirigea le conservatoire de musique d’Alep jusqu’à ce que la guerre le force à l’exil.
Ville sublime meurtrie par ce qu’il y a de plus sordide en l’homme, Alep est aussi un endroit florissant de culture dont les murs sont imprégnés de musique. Carrefour ancestral du monde, c’est en outre, une ville où les musiques classiques et traditionnelles orientales se confrontent et s’unissent. Face au retentissement des bombes, le silence est aussi un laboratoire de création musicale selon l’artiste. La musique, c’est ce qui le guide, l’aide à réfléchir, s’ouvrir à l’autre, le comprendre, s’engager. Les multiples rencontres et collaborations, comme avec Erik Marchand et la Kreizh Breizh Akademi, sont les éléments qui comptent le plus dans une vie.
Je compose donc je lutte, Fawaz Baker, intervient au Liban et en Jordanie, pays accueillant des milliers de réfugiés dans lesquelles il a ouvert des écoles de musique. Son rapport à la guerre, à la vie et à la musique s’entremêlent et ont fait de lui un citoyen du monde s’attachant à la liberté du présent. Néanmoins, ne nous attardons pas sur sa vie car d’après lui :
« J’en ai marre d’évoquer ma biographie ! Elle change tout le temps ! Sérieusement, la musique a toujours été la seule chose constante dans ma vie. »
Ainsi, le 10 octobre dernier Fawaz Baker et ses six musiciens donnent leur première représentation au Quartz. Chaque personne, avec son propre instrument, nous initient à leur musique. Parmi les instruments, nous retrouvons une darbouka, un violon, le fameux oud mais aussi le qanun, sorte de grand piano posé sur les genoux dont on pince les cordes et le riqq, tambourin occidental, sans oublier la voix de la chanteuse. L’ensemble Fawaz Baker nous transporte vers des endroits mystiques au goût d’Orient. Un voyage mélodique aux sonorités harmonieuses et parfois inconnues. Le public, d’abord perdu par l’envoûtement de la musique, se laisse ensuite absorber par le rythme. Une personne, puis deux, puis trois et ainsi de suite, de plus en plus de monde accompagne les artistes en claquant des mains. Ensuite, un par un, chaque artiste de l’ensemble entame un solo. Le violon fait surgir l’émotion, le quanun impressionne la curiosité, le chant qui charme, le oud rappelant la rythmique et la darbouka qui enthousiasme toute la salle. Une juxtaposition qui, même fragmentée, impressionne et rend compte de l’habileté de chaque artiste. Un spectacle crescendo, qui laisse les spectateurs sur une bonne note. Je préciserais néanmoins, à titre subjectif, que le public assis peut difficilement ressentir jusqu’au paroxysme la puissance de l’ensemble.
J’espère que vous avez pu le voir (ou le revoir) pendant le festival No Border. Tout d’abord, le lundi 4 et mardi 5 décembre à l’île de Batz puis à la Carène le mercredi 6 décembre.
Pour en savoir plus :
https://www.franceinter.fr/emissions/d-ici-d-ailleurs/d-ici-d-ailleurs-28-janvier-2017
http://www.letelegramme.fr/finistere/musique-fawaz-baker-artisan-de-la-paix-09-10-2017-11694012.php
http://www.festival-avignon.com/fr/artiste/2014/fawaz-baker