By

À la lecture du titre du spectacle, on pense d’abord à une énième variation autour du roman de Lewis Caroll. On se dit que l’on va passer une après-midi un peu fantasque en compagnie du Chapelier fou et du Lièvre de mars. Les enfants se demandent si un lapin blanc sortira de l’écran de fumée qui envahit progressivement la salle. Puis Sophie d’Orgeval entre en scène, des notes de saxophone retentissent, et l’on oublie tout.

Son Alice n’est ni blonde ni insouciante, mais très brune et préoccupée par des questions existentielles : « Pourquoi Maman a-t-elle la peau blanche comme du lait alors que la mienne reste toute bronzée, même l’hiver ?… Est-ce que c’est ma vraie maman ? ». Au terme d’un incroyable voyage où l’on croise des ornithorynques indolents, des enseignantes caractérielles, d’énergiques autruches et même un mystérieux lapin blanc, Alice trouvera des réponses à ses interrogations, et apprendra à s’accepter telle qu’elle est.

Portée par la musique envoûtante de Stéphane Sordet (saxophoniste de l’ensemble contemporain Sillages), Sophie d’Orgeval réussit le tour de force d’incarner à elle seule les huit rôles de la pièce. Les deux artistes s’entrecroisent sur scène dans un improbable ballet, sur une partition qui diffère un peu à chaque représentation. La comédienne de la compagnie La Rigole fait se succéder les personnages, les mimiques, les postures, et les accessoires. Le musicien se charge de l’atmosphère sonore, tour à tour joyeuse, entêtante ou inquiétante.

On se surprend à éclater de rire bruyamment avec les enfants, à retenir quelques larmes, mais surtout, à réfléchir beaucoup plus souvent qu’on ne l’aurait cru au départ. Oubliés les ronds de fumée de la Chenille et les délires mégalomaniaques de la reine de Coeur, place aux questions de fond sur l’adoption, la filiation, et l’amour maternel. Ce pourrait être soporifique ou litigieux, c’est au contraire formidablement subtil et humain.

On ne sort pas indemne d’un tel voyage. Longtemps après avoir quitté la salle, les enfants vous reparleront de cet itinéraire singulier au pays d’Alice, rythmé par le saxophone et les grelots indiens.

L’incroyable histoire d’Alice

De et avec Sophie d’Orgeval, Cie La Rigole. Accompagnée sur scène par Stéphane Sordet au saxophone.

À partir de 6 ans -

Samedi 13 septembre 2014 - Représentation à 17h au Centre Henri Queffélec - Gouesnou

About the Author

 

Leave a Reply