Ulysse et fils a été présenté à la Maison du théâtre du 3 au 7 février 2015.
Chronique de la mère (Natalia)
Ulysse et fils, de la compagnie Générale Électrique, raconte l’histoire d’un petit garçon qui attend le retour de son père parti en voyage d’affaires, à la lumière des épisodes les plus fameux de l’Odyssée. Le spectacle associe jeu d’acteur, manipulation de marionnettes et activation de machines, à l’aide desquelles Frédéric Bargy peuple la scène de l’univers d’Homère.
Ce qui arrive au petit garçon - appelons-le Télémaque - est le lot de bien des enfants : l’absence d’un des parents. La vie de Télémaque est la vie de bien des garçons : il doit ranger sa chambre, il a la chance d’aller à la fête foraine, est invité à un anniversaire, il voit sa mère cuisiner. Notons d’ailleurs que la mère est surtout présentée avec son aspirateur, ses casseroles, qu’il est question de son maquillage, mais assez peu de ses compétences intellectuelles ou professionnelles. Mais passons.
La vie de Télémaque serait donc un peu quelconque si elle n’était pas modifiée par sa transposition dans l’univers homérique. Les trouvailles du spectacle sont judicieuses : les prétendants deviennent des Oncles qui ont l’allure des cyclopes, personnages poubelles en peluche qui cachent leur œil sous le couvercle. Et au fond, si Polyphème est à l’origine de l’errance d’Ulysse, les prétendants sont ceux qui profitent de cette absence de dix ans. Télémaque est aussi invité à un anniversaire chez Circé, et les filles le maquillent et l’habillent en rose… comme un cochon.
Mais le spectacle évoque surtout les mythes qu’on se raconte dans une famille, et c’est pourquoi l’utilisation distordue des épisodes de l’Odyssée est intéressante : il ne s’agit pas seulement de jouer à décoder le spectacle, à décrypter les adaptations du texte d’Homère, mais de voir comment l’homme ne cesse d’adapter, de broder autour, de modifier, parfois pour les cacher, des événements - et il est brièvement fait allusion au fait que le départ du père est lié à une recherche d’emploi dans une région plus active, mais tout ceci n’est qu’un rêve.
Bref, il est difficile de démêler le vrai du faux, de comprendre ce que l’enfant a mal compris, mal interprété, mais c’est bien ainsi que nous nous construisons, et que nous bâtissons notre vision de l’univers, à coups d’interprétations, d’aménagement de la vérité, de « je comprends ce que je veux comprendre », d’héroïsation ou de mythification. Il n’y a pas de vérité unique? C’est bon à savoir!
Chronique de la fille (Hélène, 8 ans)
C’est une bien riche et passionnante histoire. C’est un arrière-arrière-arrière-arrière (etc.) grand-père qui s’appelle Ulysse. Et je suis son arrière-arrière-arrière-arrière (etc.) petit-fils.
Mon papa est parti en voyage et a dit que c’était un voyage d’affaires, et a découvert toutes les aventures d’Ulysse. J’ai eu un peu peur pour lui. Mais une année ce n’est pas si long et on peut s’amuser ! Une grande fête foraine, un Noël pour les cadeaux et décorer le grand sapin de papa.
La belle vie ? Mais combien de sentiments ai-je ? Tristesse, joie, peur… Et d’ailleurs, c’est quoi une odyssée ?
Cyclopes et compagnie ! Bon voyage avec Ulysse !
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