Jeudi 18, vendredi 19, samedi 20 janvier, au grand théâtre du Quartz, le Ballet du Grand Théâtre de Genève offrait au spectateur une version étonnante de Casse-Noisette, dans une chorégraphie du jeune prodige belge Jeroen Verbruggen.
Histoire de grand-mère
Beaucoup de chignons et de lunettes parsèment la salle, autant de bambins avachis sur leur siège qui quittent l’application et rangent, grand-mère oblige, le téléphone au fond de leur poche. Lever de rideau.
Entre tradition et modernité
Un pantin démantibulé aux allures de Zébulon surgit d’un rêve sur la scène, en queue de pie. Tournicoti, tournicoton, c’est que le corps est éminemment agile. Les mouvements sont saccadés, la tête se disjoint du corps, les mains semblent sous ecstasy, à tel point que les repères spatio-temporels vacillent. Le téléphone du bambin s’endort dans la poche. Où est le sapin ? Où est Noël ? Où sont les tutus ? La tête tourne. La partition de Tchaïkovski destructurée, l’ordre des tableaux chamboulé et le rythme anormalement crescendo invitent le corps des danseurs à mélanger hip-hop aux arabesques et développés. Le spectacle proposé se veut oscillation entre tradition et modernité et c’est en effet une Marie du XXIe siècle, en pleine quête identitaire, qui jaillit d’une armoire que l’on croirait tout droit sortie d’Alice au Pays des merveilles par Tim Burton. C’est que Verbruggen se joue des influences sans toutefois bafouer celle du conte d’Hoffmann. Les yeux du bambin s’écarquillent.
Un spectacle esthétique
Où est Mister Jack ? Les moulures affichent des têtes de mort, un lustre monumental offre coupes de champagne aux danseurs ; célébration d’un étrange Noël. La singularité des costumes sème le doute, serions-nous à la grand’messe de Lady Gaga ? Non, bien que les costumiers de Casse-Noisette – Livia Stoianova et Yassen Samoulov – soient également les siens. Et le bambin d’applaudir au chassé-croisé des miroirs lancés par les danseurs, enlacés par d’autres.
Bémol
La création est splendide et étonnante. L’est-elle trop ? L’argument semble en effet absent et l’histoire difficilement identifiable. Qu’importe. Grands-mères et bambins repartent, sourire aux lèvres, main dans la main. Et la Valse des fleurs pour rêver.