SOUS LE SAPIN – Iro mo ka mo, la couleur et le parfum – de Ito Naga, Collection Grands Fonds – Cheyne Éditeur
« Contrairement à ce que l’on serait tenté de croire, il ne s’agit pas ici d’un rapport ethnographique sur le Japon, sa culture, ses mœurs, ses coutumes, mais d’un regard tendre, patient et souvent amusé, ouvert à la poésie de l’infime et du subtil dont les Japonais font leur quotidien. (…) Carnet de bord d’un périple amoureux, ce livre restitue l’émotion intime, et comme étonnée d’elle-même, qui nous saisit quand s’ouvre à nous l’inconnu. »
Éprouver. Il s’agit, dans ce livre à la couverture d’un beau rouge, d’éprouver tous les entrelacs de l’émotion – et ce au travers de tous les sens en exacerbe -, d’épouser les contours d’une pensée qui se dérobe, qui se laisse couler, dans un tableau qui se compose à mesure de. Les mots s’assemblent, forment de singulières sculptures émotionnelles. Ce livre est tendre, silencieux. Le regard d’un amour, la mémoire d’un trait, d’un instant.
Comme des bribes de regards qui nous illuminent, comme des murmures qui nous procurent une sensation agréable, un bâton d’encens qui se consume, une étoffe dont on se recouvre, le temps se suspend à – écouter, ressentir, applaudir.
Lui, court aussi après des pensées apaisantes. Telles des mains qui touchent l’invisible ou l’indicible, une tendresse vouée à l’abandon des certitudes peut-être, l’émotion se saisit dans un éphémère qui s’expire délicat.
Les brins d’herbe ont aussi une ombre, non ? Il pourrait s’agir d’un autre Éloge de l’ombre, dans une étreinte, les choses que l’on a imaginées. Ces choses qui parfois dépendent seulement de notre acuité. Ce recueil est un dit de l’amour, une façon d’aimer. L’autre éclate en lumière, l’autre exprimé par le biais d’un regard, d’une odeur, d’un toucher. L’autre en couleur, l’autre en parfum. Se meut en texture, se trace en sillage.
La poésie, c’est aussi une façon de se débrouiller au quotidien. L’autre et soi, se décomposent, se recomposent, se lient et délient au flux et reflux du mouvement, de la nature, de ce qui entoure, ce qui se distancie. Ito Naga cherche les pépites, les éclats. Il tisse une toile, sculpte un amour, dans de l’épaisseur sensuelle. Il faut tout de même une discipline du désir, vois-tu !
Un portrait de clair-obscur. Tellement ébloui par l’un qu’on en oublie l’autre qui se tient dans l’ombre. La sensibilité est dévouée au détail, à l’infime, à ce que l’autre ignore ou oublie. Le monde se découvre de multiples facettes, de multiples visages. Chaque couche de vapeur qui s’élève pourrait dévoiler un secret mais une autre vient aussitôt le masquer.
Ito Naga explore, dans Iro mo ka mo, la couleur et le parfum, le monde de l’amour et de la vie comme, astrophysicien qu’il est, il scrute les planètes et les étoiles. Avec précision, embrassant le mouvement à la fois fluide et arborescent de la vitalité, il propose une poésie gorgée de justesse, de joie et d’émerveillement, aux couleurs et aux parfums du rouge mot amour.