La transe musicale de Laëtitia Shériff

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Laëtitia Shériff était en concert à la Carène vendredi 7 novembre 2014.

Elle semble ténébreuse mais elle rassure Laetitia Shériff. Par son intensité, par sa fidélité, par sa liberté. Voilà déjà une dizaine d’années qu’elle a surgi dans le paysage du rock indépendant français, entre Lille et Rennes, avec un premier album Codification. Elle a su durer, avec nouveauté, en prenant soin de marquer des parenthèses créatives, avec le groupe Trunks (musiques de films et documentaires) notamment. La revoici en solo, au chant et à la basse, avec un dernier album Pandemonium, Solace and Stars, qui semble bien engagé dans les contre-allées du prêt à écouter. Coproduit par Thomas Poli (guitariste de Dominique A et Montgomery), les douze titres sont très bien accueillis, à peine un mois après leur sortie.

Tourbillon vers les profondeurs d’émotions contrastées

Laëtitia Sherriff - Crédit photo : Yoann Buffeteau

Laëtitia Sherriff - Crédit photo : Yoann Buffeteau

Et c’est sur scène que l’on se réjouit d’entrer dans ces compositions élaborées. Un travail qui remet Laetitia Shériff en tournée, du Havre à Bordeaux, pour un final au Nouveau Casino à Paris en décembre. A Brest, la petite salle de la Carène convient au rendez-vous qui se profile dans la pénombre avec cette jolie quadra en jean’s : yeux et cheveux charbon noir, regard sensible presque timide, pas assuré. D’emblée, la salle est propulsée dans son univers noisy sophistiqué. A la batterie, Nicolas Courret soutient avec énergie cette tension harmonieuse, nourrie d’accords répétitifs à la guitare et d’une voix aussi mélodieuse que bouleversée.
To be strong est un morceau qui électrise autant qu’il nous achemine vers les profondeurs d’émotions contrastées. Au gré de ses compositions (Fellow, Living Dead), on oscille entre une certaine suavité et une rage évidente. L’atmosphère est dense, on se sent entraîné dans les méandres d’une intrigue et on a envie de se laisser aller.
Durant cette transe musicale, Laëtitia Shériff nous fait passer de l’enfer au ciel avec harmonie. Le jeu musical est physique et livre beaucoup d’intensité. On est pris dedans comme dans un tourbillon océanique. Le final sur Far and Wide est une superbe évasion poignante et tout compte fait libératrice, apaisante. Laëtitia Shériff semble atteindre aussi une sorte de délivrance, descendant de scène pour s’immerger avec volupté dans son public. On voit alors en elle la grâce d’une Beth Gibbons de Portishead, la rage d’une Kristin Hersh des Throwing Muses et la créativité d’une Patti Smith. Féline, écorchée, insoumise, elle murit patiemment sa propre esthétique de pop-rock orageuse, entre ballades et estocades bien menées.

NB : Laëtitia Shériff et ses musiciens ont été victimes d’un vol de leurs instruments lors de cette tournée depuis, le week-end dernier à Évry. Voici un post Facebook où l’artiste déplore ces faits et détaille le matériel disparu, qu’une communauté de musiciens relaie afin de contrer des reventes sur le net.
https://www.facebook.com/laetitiasheriff/posts/10152785494926421?fref=nf

About the Author

Journaliste freelance, Marguerite écrit dans le Poulailler par envie de prolonger les émotions d’un spectacle, d’un concert, d’une expo ou de ses rencontres avec les artistes. Elle aime observer les aventures de la création et recueillir les confidences de ceux qui les portent avec engagement. Le spectacle vivant est un des derniers endroits où l’on partage une expérience collective.

 

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